Ci-dessous, le discours prononcé par Bastien Confais lors de l’assemblée générale de l’association de préfiguration de la fondation 3A.

La fondation 3A a pour but de proposer des services permettant de développer l’autonomie des personnes autistes dans le département.

Introduction

Je souhaite tout d’abord remercier la fondation 3A pour m’avoir invité à participer à cette assemblée générale. C’est un immense plaisir pour moi d’être là aujourd’hui. Je tiens à préciser que je ne sais pas parler en public et que je ne sais que me contenter de lire une feuille. Je sais que cela rend le message plus difficile à faire passer et j’en suis sincèrement désolé.

Je m’appelle Bastien et j’ai eu la chance de pouvoir effectuer toute ma scolarité en milieu ordinaire, grâce à des enseignants flexibles et ouverts à la différence. Après mon baccalauréat j’ai poursuivi mes études à l’IUT de Nantes puis à l’école Polytech avant de soutenir ma thèse de doctorat en informatique, l’année dernière, en juillet 2018.

Quelques mois avant ma soutenance de thèse, j’ai eu la chance de passer une semaine en Irlande pendant laquelle j’ai fait connaissance de l’association AsIAm. AsIAm est une association qui a été créée par une personne autiste et dont le but est de faire de l’Irlande un pays accessible à ces personnes, c’est-à-dire un pays dans lequel les personnes autistes peuvent vivre la même vie que tout le monde: aller à l’école, avoir un travail mais aussi aller dans les magasins, socialiser sur le temps libre et avoir des loisirs.

Une vision positive de l’autisme

Le premier constat qu’ils ont fait est qu’aujourd’hui, une personne sur 100 est autiste. Statistiquement, tout le monde a déjà rencontré une personne autiste. Cependant, il est facile de ne pas s’en rendre compte car l’autisme est un handicap invisible. Lorsque les gens se rendent compte qu’ils ont à faire à une personne autiste, beaucoup aimeraient l’aider mais la plupart ne savent pas comment s’y prendre car elles n’ont pas de connaissances ou ont des connaissances erronées sur l’autisme. Par exemple, certaines personnes pensent encore que les personnes autistes sont « dans leur monde » ou que l’autisme ne concerne que les enfants. Être sensibilisé à l’autisme ne suffit pas pour inclure une personne. Il faut comprendre le handicap et savoir quels sont les obstacles que la personne rencontre. Pour faire une analogie, vous pouvez savoir que le japonais est une langue, si vous ne savez pas la parler, vous ne pourrez pas inclure quelqu’un qui ne parle que ça.

La conséquence est que pour les personnes autistes, aller à l’école, au travail ou tout simplement, sortir de chez soi demande beaucoup d’efforts et d’énergie.

Imaginez ce que serait pour vous là tout de suite d’être envoyé dans un monde qui n’est pas construit pour vous. Imaginez d’être envoyé dans un métro, au milieu de Tokyo. Imaginez le grand nombre de personnes autour de vous. Vous n’avez pas d’espace personnel et vous pouvez à peine bouger. Tout le monde est en train de parler en même temps et vous n’arrivez pas à suivre le fil de vos pensées. Peut-être même que quelqu’un s’est mis du parfum qui sent fort. C’est juste un environnement horrible et vous attendez avec impatience que le métro s’arrête à la station et que vous puissiez en sortir. Une fois arrivé, tout le monde part travailler, mais pour vous, c’est un monde nouveau. Vous ne savez pas quoi faire ni où vous devez aller. Vous faites alors la seule chose logique que vous pouvez faire. Vous allez demander de l’aide à quelqu’un. Même si vous parlez la langue du pays, vous n’êtes pas certain de comprendre tout ce que la personne vous dit car elle parle très vite. Peut-être même que le langage corporel et les expressions du visage sont différentes et vous n’êtes finalement pas si sûr si cette personne est contente de vous aider ou si elle est réellement ennuyée.

L’autisme, ce n’est pas juste avoir des difficultés à communiquer, c’est également avoir beaucoup de mal à supporter l’environnement sensoriel comme certaines lumières, certains bruits, ou encore la proximité avec les gens dans la foule. Ll’autisme c’est également de vivre dans un monde totalement imprévisible ou vous avez beaucoup de mal  à savoir, à prévoir ce qui va se passer. Cela génère beaucoup de stress tout au long de la journée. Vous avez besoin constamment d’être rassuré et que les choses soient clairement prévues et organisées.

L’autisme ne doit pas être vu comme une maladie, n’est pas quelque chose de négatif et accueillir les personnes autistes ne doit plus être vu comme de la charité mais comme une opportunité.

Les partenariats sont essentiels pour avancer

C’est ce message qu’AsIAm diffuse dans toute la société. Ils ont par exemple commencé par les écoles pour expliquer non seulement aux enseignants mais également à l’ensemble des élèves comment inclure un élève autiste. Ils ont continué en travaillant avec les entreprises ou avec les universités qui veulent mettre en place un environnement dans lequel les personnes autistes puissent s’épanouir. Par exemple, l’université de Dublin propose maintenant aux élèves d’assister à certains cours par vidéo/conférence. Des lieux calmes sont également mis à disposition, avec l’installation par exemple de caissons à plusieurs endroits des campus, permettant de s’isoler et de se ressourcer.

Ils ont formé les opérateurs de transport en commun, les aéroports, mais aussi le personnel des bibliothèques et des musées aux difficultés que rencontrent les personnes autistes, notamment pour faire la queue ou pour faire face à la foule qui se trouve souvent dans ces endroits. Ils ont formé une grande chaîne de supermarché qui met à disposition des ressources afin de permettre aux personnes de préparer leur visite. Par exemple sur le site web, ils ont publié le plan des rayons, ainsi qu’une liste des bruits et des stimulis sensoriels qui peuvent être rencontrés aux différents endroits du magasin. Ces supermarchés organisent également chaque semaine des heures pendant lesquelles la musique est éteinte, le bip à la caisse supprimé et où les rayons proprement rangés. Plus récemment, ils ont créé la première ville d’Irlande entièrement accessible aux personnes autistes, où plus de la moitié des personnels des entreprises et des lieux de vie savent ce qu’est l’autisme et savent mettre en place des aménagements pour accueillir les personnes concernées.

Pour résumer, je crois qu’une des grandes forces d’AsIAm est de ne pas proposer une recette toute faite pour inclure les personnes autistes mais de faire comprendre l’autisme et faire comprendre aux organisations d’adopter une culture plus ouverte et tolérante. 

L’autre grande force d’AsIam est de nouer des partenariats. Des partenariats avec les entreprises, les administrations et les services publics mais également des partenariats académiques, non pas pour chercher les causes de l’autisme mais pour identifier comment rendre la vie de ces personnes plus épanouie. Des partenariats avec le monde politiques complètent . Par exemple, aux dernières élections locales, AsIAm a demandé à chaque candidat quel était leur programme sur l’autisme et leur faire part de leurs souhaits d’accessibilité.

Les groupes de personnes autistes

D’autre part, pour faire face à l’isolement et à l’exclusion des personnes autistes de la société, plusieurs groupes de personnes autistes comme Autistic paddies ou Aspire Ireland ont vu le jour ces dernières années. Ces groupes sont réellement importants pour les personnes autistes car ils sont souvent l’occasion pour ces personnes de se rencontrer, de rencontrer des personnes qui ont les mêmes centres d’intérêt, de socialiser et de faire des activités. En d’autres mots ces groupes permettent aux personnes autistes, de sortir de chez elles et de rompre l’isolement auquel elles font souvent face. Ces groupes ont des partenariats avec AsIAm permettant aux personnes autistes de faire part des barrières qu’elles rencontrent au quotidien et exprimer quels sont leurs besoins. Cela leur permet d’influer sur le message qu’AsIAm délivre dans la société.

Un groupe d’entraide mutuelle à Nantes

Même si l’Irlande n’est pas encore aujourd’hui le meilleur endroit sur terre pour les personnes autistes, ils nous montrent clairement la direction que nous devons prendre pour rendre la société plus accessible. Nous passons souvent trop de temps à réfléchir à ce que nous devons ou pouvons faire sans nous rendre compte que de nombreux pays ont fait face aux mêmes problématiques et y ont apporté leur solution.

J’ai été très heureux de rencontrer la fondation 3A qui a su se montrer à l’écoute de ce message et l’a très bien accueilli. Ils se sont proposés de m’aider dans la création d’un Groupe d’entraide mutuelle pour les personnes autisme dans le département. Les groupes d’entraides mutuelles sont la version française des groupes de personnes autistes que nous pouvons trouver en Irlande. Avoir un tel groupe en Loire-Atlantique serait une première étape pour permettre aux personnes autistes de se retrouver mais aussi d’être entendue. Car aujourd’hui nous parlons sans cesse d’inclusion, mais ce que nous voulons, c’est que les personnes autistes soient non seulement incluses mais puissent également contribuer à la société.

Merci.