Beaucoup de parents recherchent désespérément une Aide de Vie Scolaire (AVS) pour aider leur enfant sur le temps scolaire. C’est même très souvent une condition nécessaire pour que l’enfant soit scolarisé dans une école « ordinaire ».

Pour ma part, je n’ai eu une AVS qu’en classe de seconde pour m’aider à faire la transition entre le collège et le lycée, pour m’aider entre les cours et pendant les travaux pratiques.

De l’école primaire, au collège et pendant mes deux dernières années de lycée, j’ai dû me débrouiller seul. En classe, recopier le cours du tableau me donnait des crampes au poignet. Mes cahiers étaient tellement illisibles que pour réviser le cours pour un contrôle je comptais uniquement sur ma mémoire et le cours du livre. L’organisation m’a également posé énormément de problèmes. Savoir quelles affaires apporter en classe, lesquelles laisser à la maison et lesquelles mettre dans le casier a toujours été une grande source d’angoisse. La technique que j’ai adoptée afin de ne rien oublier ni à l’école, ni à la maison est de préparer le soir, le cartable avec toutes les affaires pour la journée du lendemain. Ne rien laisser dans le casier à l’école fut la solution. Pourtant avec un cartable pouvant peser plus de 13 Kg certains jours de la semaine, mon dos porte encore aujourd’hui les séquelles de cette stratégie d’organisation. C’est dans ces moments là que je pense qu’un peu d’aide m’aurait été utile. La pause du midi et les récréations furent également très difficile à gérer seuls. Ne pas savoir comment aller vers les autres, se faire des amis et surtout les garder sans se faire rejeter au bout d’un moment, sans oublier faire face au harcèlement ont fait de cette période de ma vie l’une des plus difficiles.

Malgré ces difficultés, j’ai rencontré beaucoup d’enseignants ouverts à la différence et tolérants et qui ont mis en place des aménagements qui me furent très utiles :

  • Un emploi du temps qui me permit de ne plus manger à la cantine le midi. Beaucoup de personnes ne s’imaginent pas comment la cantine est quelque chose de difficile. En plus des odeurs insupportables de la nourriture, vous devez supporter le bruit des élèves qui parlent, discutent, rigolent en mangeant. Cela est tellement épuisant que certains après-midi, notamment à l’école primaire finissaient en crise/« meltdown »/effondrement. Pouvoir rentrer à la maison le midi lorsque j’étais au lycée m’a donné un peu plus de temps pour respirer.

  • Une salle pour travailler pour les examens. Passer un examen est pour beaucoup de personnes une source de stress. Pour moi, gérer le stress lié au déroulement de l’épreuve : trouver sa place dans la salle, aller poser son cartable au fond de la pièce rajoute du stress. Se concentrer est également difficile. Les salles d’examens ne sont jamais silencieuses, il y a toujours des bruits de crayons, de papier, des personnes qui réfléchissent en chuchotant. Avoir une salle pour moi tout seul dans laquelle je pouvais réfléchir et me concentrer fut vraiment très utile pour me concentrer. J’avais également la permission de rédiger les examens au crayon à papier (qui peut se gommer maintes et maintes fois) et sur mes propres feuilles de papier (écrire droit sur les lignes a toujours été difficile, j’emportais des feuilles sur lesquelles les lignes sont violettes et les interlignes bleues, maintenant beaucoup de feuilles sont quadrillées uniquement en bleu, ce qui n’aide pas à repérer les lignes des interlignes).

  • Être assis au premier rang. Le premier rang a été depuis le collège, une place de choix. Cela permet d’une part d’être plus près de l’enseignant, afin qu’il puisse réagir au plus vite si quelque chose ne se passe pas comme prévu. Mais cela permet surtout de ne pas voir les autres élèves, de ne pas être distrait et d’avoir l’impression que le cours se passe uniquement entre moi et l’enseignant. Cela a vraiment été quelque chose de bénéfique pour moi.

  • Tiers temps. L’aménagement du tiers temps est proposé a beaucoup d’élèves handicapés. Bien que rester assis pendant de longues périodes lors d’un examen est difficile, avoir du temps supplémentaire n’apporte pas grand-chose et peut même être contre-productif. Toutefois, je ne suis pas du tout concis dans mes réponses et je peux écrire plusieurs pages pour répondre à une simple question d’un contrôle. Ne pas avoir le temps de terminer, d’écrire tout ce que je voulais dire est très frustrant et j’ai déjà fait quelques crises au collège parce que l’enseignant voulait prendre ma copie car le temps du devoir était écoulé. De ce point de vue, le tiers temps m’a été bénéfique.

  • Dispense d’évaluation en sport. Le sport a toujours été la matière scolaire la plus difficile. Ayant une des difficultés à coordonner mes mouvements, rattraper une balle, courir ont toujours été des activités qui sont très fatigante et qui demandent beaucoup de concentration. Ne pas être choisi et inclus dans une équipe est toujours blessant. Depuis le collège, j’ai bénéficié d’une dispense de notation en sport. Je n’étais pas évalué dans cette matière. Toutefois, certaines années, j’assistais quand même au cours. L’enseignant me faisait compter les points, chronométrer les temps de course, rédiger les tableaux de tournois, etc. De ce point de vue, j’étais assez bien inclus dans le cours. D’autres années j’étais complètement dispensé et ne participait pas au cours.

  • Travaux pratiques en Chimie et en Sciences de la vie et de la Terre. Je n’étais pas mauvais dans ces matières mais porter une blouse pour réaliser les travaux pratiques m’était impossible à cause de la texture et de l’odeur. L’année où j’eus une AVS, ce fut cette personne qui réalisait les manipulations pour moi. Les autres années, lorsque les travaux pratiques étaient à faire en groupe, je rédigeais le compte-rendu tandis que l’autre personne manipulait. J’ai également eu la permission de manipuler sans blouse quelques fois.

  • Ne pas participer à l’oral. Parler devant un groupe de personnes m’est difficile. Se savoir que toute l’attention est porté sur soi m’est insupportable. Par exemple, si un enseignant m’interroge en classe, je suis incapable de prononcer le moindre mot. Dans le meilleur des cas je reste bloqué sans bouger ou bien je me mets à pleurer. Les enseignants ne m’interrogeaient pas. Cependant pour me faire participer, certains venaient lire mes réponses sur mon cahier à haute voix ou les recopiaient au tableau. Les enseignants m’ont également permis de réaliser les évaluations à l’orale à l’écrit.

  • Pouvoir compter sur les enseignants. Certains enseignants ont été très attentifs, à me dire personnellement bonjour et au revoir à chaque début et fin de cours. Pouvoir aller à la fin du cours, demander des explications supplémentaires ou de répéter ce que je n’ai pas eu le temps d’écrire pendant leur cours, tout en empiétant sur leur temps de pause a aussi été très bénéfique. En cas de changement d’emploi du temps, imprévu, être prévenu personnellement par le personnel du lycée qui téléphonait également à mes parents m’a évité beaucoup d’anxiété.

Avec le recul, je me dis que ces aménagements m’ont permis de poursuivre des études. Même si la présence d’une AVS m’aurait été utile, notamment à l’école primaire et au collège, où mes difficultés étaient plus prononcées. J’espère toutefois que cette liste pourra donner des idées d’adaptations à d’autres parents, écoles et élèves autistes.

Je pense sincèrement que des enseignants ouverts à la différence et tolérants sont aussi importants que la présence d’une AVS.